Page 19 - Cinenews-N°110-Septembre-Octobre 2024
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            les individus, surtout lorsqu’ils sont confrontés
            à des obstacles et à des défis qui dépassent leurs
            émotions. ‘TRIPLE A’ tente de présenter une
            vision profonde des relations amoureuses et de
            leur impact émotionnel et psychologique sur les
            personnages. C’est un questionnement existentiel
            porté par les défis auxquels l’être humain est
            confronté dans une société pleine de contradictions.

            Vous avez affirmé que le film a été 
            porté par les acteurs. Ont-ils eu carte 
            blanche dans leur interprétation ?
            Absolument pas. En tant que scénariste, je conçois
            les personnages avec beaucoup de soin, je les
            façonne dans mon imagination avant de leur
            donner vie avec l’aide d’acteurs talentueux. Je
            veille à ce que le public les perçoive exactement
            comme je les ai imaginés. Je travaille avec mes
            personnages, qu’ils soient positifs ou négatifs,
            avec amour et je leur consacre beaucoup de
            temps pour leur donner une identité claire et
            précise. Les acteurs, en les incarnant, complètent
            ce travail pour qu’ils apparaissent de manière
            éclatante à l’écran. C’est un travail en duo, où
            la collaboration est essentielle et où il n’y a pas
            de place pour l’improvisation hasardeuse.

            Ce n’est pas la première fois que vous 
            tournez avec le couple Majdouline Idrissi 
            et Aziz Dadas. Qu’est-ce qui vous attire 
            dans ce duo sacré du cinéma marocain ?
            J’ai été la première à croire en ce duo magnifique
            lorsque j’ai réalisé ‘Au pays des merveilles’ en
            2017, et le résultat de leur rencontre à l’écran a été
            tout simplement éblouissant. Ils ont transformé
            le plateau de tournage en une véritable comédie,
            à la fois devant la caméra et en coulisses. Ce   toujours été fascinée par le mélange des genres
            n’est pas étonnant, car Majdouline Idrissi est   cinématographiques. Ce mélange est comparable
            une actrice exceptionnelle, capable d’endosser   à la magie du mélange des couleurs sur une
            tous les rôles avec une fluidité déconcertante.   palette ; c’est la dose exacte qui produit les plus
            Elle a su s’affranchir du rôle de ‘fille gâtée’ pour   belles œuvres. Dans mon premier film ‘Au pays
            devenir l’une des plus grandes stars du Maroc.   des merveilles’, j’ai abordé les souffrances des
            Quant à Aziz Dadas, il est le maître incontesté   populations marginalisées des campagnes et
            de la comédie. Il lui suffit d’apparaître à l’écran   des montagnes, en particulier face à la rudesse
            pour provoquer le rire du public, et grâce à son   des conditions climatiques. J’avais alors estimé
            sérieux et à son dévouement, il s’est imposé   que la comédie était le meilleur moyen de
            comme un véritable acteur de talent. Dans   faire accepter au public un sujet aussi dur. La
            ‘TRIPLE A’, je les ai placés devant un défi de   comédie permet de rendre un sujet difficile
            taille : abandonner leurs rôles précédents pour   plus accessible et d’engager le public à travers
            apparaître sous un jour totalement différent.   l’humour, tout en lui faisant prendre conscience
            Je laisse aux spectateurs le plaisir de découvrir   des souffrances des personnes marginalisées.
            cette transformation dans les salles de cinéma.  Dans mon dernier film, ‘TRIPLE A’, j’ai choisi la
                                                     comédie noire comme vecteur pour aborder des
            Comment se fait le mélange entre la violence des   thèmes douloureux qui nous interpellent tous.
            histoires racontées et l’aspect comique du film ?  Ce sont des tabous sociaux répugnants qu’il faut
            Depuis mes débuts dans le cinéma, j’ai   d’abord reconnaître, puis affronter avec courage.



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